← —Aimé, vous pourrez dire à M. de Stermaria qu'il n'est pas le seul noble qu'il y ait eu dans cette salle à manger. Vous avez bien vu ce monsieur qui a déjeuné avec moi ce matin? Hein? petites moustaches, air militaire? Eh bien, c'est le marquis de Cambremer. —Ah, vraiment? cela ne m'étonne pas! 🔊✎
← —Ça lui montrera qu'il n'est pas le seul homme titré. Et attrape donc! Il n'est pas mal de leur rabattre leur caquet à ces nobles. Vous savez, Aimé, ne lui dites rien si vous voulez, moi, ce que j'en dis, ce n'est pas pour moi; du reste, il le connaît bien. 🔊✎
← Il répétait tout le temps le nom d'Aimé, ce qui faisait que quand il avait quelqu'un à dîner, son invité lui disait: «Je vois que vous êtes tout à fait bien dans la maison» et croyait devoir aussi prononcer constamment «Aimé» par cette disposition, où il entre à la fois de la timidité, de la vulgarité et de la sottise, qu'ont certaines personnes à croire qu'il est spirituel et élégant d'imiter à la lettre les gens avec qui elles se trouvent. 🔊✎
← On eût dit aussi un père heureux et attendri qui veille sans le troubler sur le bonheur de fiançailles qui se sont nouées à sa table. Du reste, il suffisait qu'on prononçât le nom d'une personne titrée pour qu'Aimé parût heureux, au contraire de Françoise devant qui on ne pouvait dire «le comte Un tel» sans que son visage s'assombrît et que sa parole devînt sèche et brève, ce qui signifiait qu'elle chérissait la noblesse, non pas moins que ne faisait Aimé, mais davantage. 🔊✎
← Elle n'était pas de la race agréable et pleine de bonhomie dont Aimé faisait partie. 🔊✎
← Il est, d'ailleurs, à croire que pour que même de notre bouche à nous, qu'elle appelait si humblement ses maîtres et qui l'avions presque si entièrement domptée, elle ne pût entendre, sans avoir à réprimer un mouvement de colère, le nom d'un noble, il fallait que la famille dont elle était sortie occupât dans son village une situation aisée, indépendante, et qui ne devait être troublée dans la considération dont elle jouissait que par ces mêmes nobles chez lesquels au contraire, dès l'enfance, un Aimé a servi comme domestique, s'il n'y a pas été élevé par charité. 🔊✎
← «Allez me chercher votre maître d'hôtel. Il n'y a que lui ici qui soit capable de faire une commission intelligemment, dit M. de Charlus avec hauteur.—Monsieur Aimé, Monsieur? demanda le groom.—Je ne sais pas son nom, mais si, je me rappelle que je l'ai entendu appeler Aimé. Allez vite, je suis pressé.—Il va être tout de suite ici, monsieur, je l'ai justement vu en bas», répondit le groom qui voulait avoir l'air au courant. 🔊✎
← «Monsieur, Monsieur Aimé est couché. Mais je peux faire la commission.—Non, vous n'avez qu'à le faire lever.» «Monsieur, je ne peux pas, il ne couche pas là.—Alors, laissez-nous tranquilles.—Mais, monsieur, dis-je, le groom parti, vous êtes trop bon, un seul volume de Bergotte me suffira.—C'est ce qui me semble, après tout.» M. de Charlus marchait. 🔊✎
← On frappa; c'était Aimé qui avait tenu à m'apporter lui-même les dernières listes d'étrangers. 🔊✎
← Il a posé sa cigarette, continua Aimé en mimant la scène et en secouant la tête et l'index comme avait fait son client voulant dire: il ne faut pas être trop exigeant. «Pas cette année, Aimé, qu'il m'a dit en me touchant à l'épaule, ce n'est pas possible. Mais à Pâques, oui!» Et Aimé me frappa légèrement sur l'épaule en me disant: «Vous voyez je vous montre exactement comme il a fait», soit qu'il fût flatté de cette familiarité d'un grand personnage, soit pour que je pusse mieux apprécier en pleine connaissance de cause la valeur de l'argument et nos raisons d'espérer. 🔊✎