← Quand M. de Norpois se servait de certaines expressions qui traînaient dans les journaux et les prononçait avec force, on sentait qu'elles devenaient un acte par le seul fait qu'il les avait employées et un acte qui susciterait des commentaires. 🔊✎
← On m'a affirmé que précisément à ce mot d'«affinités» qui était en somme la grosse innovation du discours, et qui défraiera, encore longtemps vous verrez, les commentaires des chancelleries, Sa Majesté, prévoyant la joie de notre ambassadeur, qui allait trouver là le juste couronnement de ses efforts, de son rêve pourrait-on dire et, somme toute, son bâton de maréchal, se tourna à demi vers Vaugoubert et fixant sur lui ce regard si prenant des Oettingen, détacha ce mot si bien choisi d'«affinités», ce mot qui était une véritable trouvaille, sur un ton qui faisait savoir à tous qu'il était employé à bon escient et en pleine connaissance de cause. 🔊✎
← Mais ce contraste frappait moins autrefois qu'au temps de Bergotte, parce que d'une part, au fur et à mesure que se corrompait la société, les notions de moralité allaient s'épurant, et que d'autre part le public s'était mis au courant plus qu'il n'avait encore fait jusque-là de la vie privée des écrivains; et certains soirs au théâtre on se montrait l'auteur que j'avais tant admiré à Combray, assis au fond d'une loge dont la seule composition semblait un commentaire singulièrement risible ou poignant, un impudent démenti de la thèse qu'il venait de soutenir dans sa dernière oeuvre. 🔊✎
← Mais enfin il y a entre ce que fut l'élégance du salon de Mme Swann et tout un côté de l'oeuvre de Bergotte des rapports tels que chacun des deux peut être alternativement, pour les vieillards d'aujourd'hui, un commentaire de l'autre. 🔊✎
← De sorte que chaque fois que nous avons parlé de nous, nous pouvons être sûrs que nos inoffensives et prudentes paroles, écoutées avec une politesse apparente et une hypocrite approbation, ont donné lieu aux commentaires les plus exaspérés ou les plus joyeux, en tous cas les moins favorables. 🔊✎
← Au moment où notre nom résonne dans la bouche du présentateur, surtout si celui-ci l'entoure comme fit Elstir de commentaires élogieux, ce moment sacramentel, analogue à celui où, dans une féérie, le génie ordonne à une personne d'en être soudain une autre, celle que nous avons désiré d'approcher, s'évanouit; d'abord comment resterait-elle pareille à elle-même puisque—de par l'attention que l'inconnue est obligée de prêter à notre nom et de marquer à notre personne—dans les yeux hier situés à l'infini (et que nous croyions que les nôtres, errants, mal réglés, désespérés, divergents, ne parviendraient jamais à rencontrer) le regard conscient, la pensée inconnaissable que nous cherchions, vient d'être miraculeusement et tout simplement remplacée par notre propre image peinte comme au fond d'un miroir qui sourirait. 🔊✎