← Mais quand ils furent tombés, quand ma mère—bien que cette matinée eût lieu précisément le jour de la séance de la Commission après laquelle mon père devait ramener dîner M. de Norpois —m'eût dit: «Hé bien, nous ne voulons pas te chagriner, si tu crois que tu auras tant de plaisir, il faut y aller», quand cette journée de théâtre, jusque-là défendue, ne dépendit plus que de moi, alors, pour la première fois, n'ayant plus à m'occuper qu'elle cessât d'être impossible, je me demandai si elle était souhaitable, si d'autres raisons que la défense de mes parents n'auraient pas dû m'y faire renoncer. 🔊✎
← J'en éprouvai dans le petit square qui précédait le théâtre et dont, deux heures plus tard, les marronniers dénudés allaient luire avec des reflets métalliques dès que les becs de gaz allumés éclaireraient le détail de leurs ramures; devant les employés du contrôle, desquels le choix, l'avancement, le sort, dépendaient de la grande artiste—qui seule détenait le pouvoir dans cette administration à la tête de laquelle des directeurs éphémères et purement nominaux se succédaient obscurément—et qui prirent nos billets sans nous regarder, agités qu'ils étaient de savoir si toutes les prescriptions de Mme Berma avaient bien été transmises au personnel nouveau, s'il était bien entendu que la claque ne devait jamais applaudir pour elle, que les fenêtres devaient être ouvertes tant qu'elle ne serait pas en scène et la moindre porte fermée après, un pot d'eau chaude dissimulé près d'elle pour faire tomber la poussière du plateau: et, en effet, dans un moment sa voiture attelée de deux chevaux à longue crinière allait s'arrêter devant le théâtre, elle en descendrait enveloppée dans des fourrures, et, répondant d'un geste maussade aux saluts, elle enverrait une de ses suivantes s'informer de l'avant-scène qu'on avait réservée pour ses amis, de la température de la salle, de la composition des loges, de la tenue des ouvreuses, théâtre et public n'étant pour elle qu'un second vêtement plus extérieur dans lequel elle entrerait et le milieu plus ou moins bon conducteur que son talent aurait à traverser. 🔊✎
← En ce sens c'était bien en effet chaque jour une nouvelle amitié qui commençait. Chaque soir en rentrant je me rendais compte que j'avais à dire à Gilberte des choses capitales, desquelles notre amitié dépendait, et ces choses n'étaient jamais les mêmes. Mais enfin j'étais heureux et aucune menace ne s'élevait plus contre mon bonheur. 🔊✎
← Et tous les jours, quand elle descendait pour aller dans sa calèche faire une promenade, sa femme de chambre qui portait ses affaires derrière elle, son valet de pied qui la devançait semblaient comme ces sentinelles, qui aux portes d'une ambassade, pavoisée aux couleurs du pays dont elle dépend, garantissent pour elle, au milieu d'un sol étranger, le privilège de son exterritorialité. 🔊✎
← Et même l'eût-il légèrement ressentie qu'il l'eût réprimée, à cause d'une sorte de croyance superstitieuse que de sa propre fidélité pouvait dépendre celle de sa maîtresse. 🔊✎
← «Hé bien, j'irai seul. Selon les deux ridicules alexandrins du sieur Arouet, je dirai à Saint-Loup, pour charmer son cléricalisme: «Apprends que mon devoir ne dépend pas du sien, qu'il y manque s'il veut; je dois faire le mien.» «Je reconnais qu'il est assez joli garçon, me dit Albertine, mais ce qu'il me dégoûte!» Je n'avais jamais songé que Bloch pût être joli garçon; il l'était, en effet. 🔊✎
← Dame, ça dépend. C'est tout à fait les petites oies blanches. Ça a peut-être son charme. 🔊✎
← Tout dépend de l'examinateur. 🔊✎
← Même mentalement, nous dépendons des lois naturelles beaucoup plus que nous ne croyons et notre esprit possède d'avance comme certain cryptogame, comme telle graminée, les particularités que nous croyons choisir. 🔊✎
← Mais surtout de la même manière mais bien plus utilement qu'on dit, dans un récit, le temps qu'il faisait tel jour, je devrais donner toujours son nom à la croyance qui tel jour où je voyais Albertine régnait sur mon âme, en faisant l'atmosphère, l'aspect des êtres, comme celui des mers, dépendant de ces nuées à peine visibles qui changent la couleur de chaque chose, par leur concentration, leur mobilité, leur dissémination, leur fuite—comme celle qu'Elstir avait déchirée un soir en ne me présentant pas aux jeunes filles avec qui il s'était arrêté et dont les images m'étaient soudain apparues plus belles, quand elles s'éloignaient—nuée qui s'était reformée quelques jours plus tard quand je les avais connues, voilant leur éclat, s'interposant souvent entre elles et mes yeux, opaque et douce, pareille à la Leucothea de Virgile. 🔊✎