← Je l'écoutais comme j'aurais lu Phèdre, ou comme si Phèdre, elle-même avait dit en ce moment les choses que j'entendais, sans que le talent de la Berma semblât leur avoir rien ajouté. 🔊✎
← Je l'avais écrit avec une exaltation qu'il me semblait devoir communiquer à ceux qui le liraient. 🔊✎
← Et cependant pour la même raison j'étais fort inquiet de l'impression que j'avais dû produire sur lui, le mépris que j'avais supposé qu'il aurait pour mes idées ne datant pas d'aujourd'hui, mais des temps déjà anciens où j'avais commencé à lire ses livres, dans notre jardin de Combray. 🔊✎
← Et plus que le livre, les fleurs vivaient; on était gêné si on entrait faire une visite à Mme Swann de s'apercevoir qu'elle n'était pas seule, ou si on rentrait avec elle de ne pas trouver le salon vide, tant y tenaient une place énigmatique et se rapportant à des heures de la vie de la maîtresse de maison, qu'on ne connaissait pas, ces fleurs qui n'avaient pas été préparées pour les visiteurs d'Odette, mais comme oubliées là par elle, avaient eu et auraient encore avec elle des entretiens particuliers qu'on avait peur de déranger, et dont on essayait en vain de lire le secret, en fixant des yeux la couleur délavée, liquide, mauve et dissolue des violettes de Parme. 🔊✎
← A cause de cet étouffement des sons par les tapis et de sa retraite dans des enfoncements, la maîtresse de la maison n'étant pas avertie de votre entrée comme aujourd'hui, continuait à lire pendant que vous étiez déjà presque devant elle, ce qui ajoutait encore à cette impression de romanesque, à ce charme d'une sorte de secret surpris, que nous retrouvons aujourd'hui dans le souvenir de ces robes déjà démodées alors, que Mme Swann était peut-être la seule à ne pas avoir encore abandonnées et qui nous donnent l'idée que la femme qui les portait devait être une héroïne de roman parce que nous, pour la plupart, ne les avons guère vues que dans certains romans d'Henry Gréville. 🔊✎
← C'est ainsi que bâille d'avance d'ennui un lettré à qui on parle d'un nouveau «beau livre», parce qu'il imagine une sorte de composé de tous les beaux livres qu'il a lus, tandis qu'un beau livre est particulier, imprévisible, et n'est pas fait de la somme de tous les chefs-d'oeuvre précédents mais de quelque chose que s'être parfaitement assimilé cette somme ne suffit nullement à faire trouver, car c'est justement en dehors d'elle. 🔊✎
← «Je ne peux pas, ajouta-t-elle, dire comme Mme de Sévigné que si nous voulions par fantaisie trouver un mauvais fruit, nous serions obligés de le faire venir de Paris.—Ah, oui, vous lisez Mme de Sévigné. Je vous vois depuis le premier jour avec ses lettres (elle oubliait qu'elle n'avait jamais aperçu ma grand'mère dans l'hôtel avant de la rencontrer dans cette porte). Est-ce que vous ne trouvez pas que c'est un peu exagéré ce souci constant de sa fille, elle en parle trop pour que ce soit bien sincère. Elle manque de naturel.» Ma grand'mère trouva la discussion inutile et pour éviter d'avoir à parler des choses qu'elle aimait devant quelqu'un qui ne pouvait les comprendre, elle cacha, en posant son sac sur eux, les mémoires de Madame de Beausergent. 🔊✎
← Comme je lui avouais la déception que j'avais eue devant l'église de Balbec: «Comment, me dit-il, vous avez été déçu par ce porche, mais c'est la plus belle Bible historiée que le peuple ait jamais pu lire. 🔊✎
← Il me répondit que si, sans embarras, comme s'il s'agissait d'une partie déjà un peu ancienne de son existence et s'il ne se doutait pas de la déception extraordinaire qu'il éveillait en moi, mais levant les yeux, il la lut sur mon visage. 🔊✎
← Ainsi un jour Albertine avait dit: «Qu'est-ce qui a un crayon?» Andrée l'avait fourni. Rosemonde le papier. Albertine leur avait dit: «Mes petites bonnes femmes, je vous défends de regarder ce que j'écris.» Après s'être appliquée à bien tracer chaque lettre, le papier appuyé à ses genoux, elle me l'avait passé en me disant: «Faites attention qu'on ne voie pas.» Alors je l'avais déplié et j'avais lu ces mots qu'elle m'avait écrits: «Je vous aime bien.» 🔊✎