← Ce supplice que lui infligeait ma grand’tante, le spectacle des vaines prières de ma grand’mère et de sa faiblesse, vaincue d’avance, essayant inutilement d’ôter à mon grand-père le verre à liqueur, c’était de ces choses à la vue desquelles on s’habitue plus tard jusqu’à les considérer en riant et à prendre le parti du persécuteur assez résolument et gaiement pour se persuader à soi-même qu’il ne s’agit pas de persécution; elles me causaient alors une telle horreur, que j’aurais aimé battre ma grand’tante. 🔊✎
← Je crois que vous ne lui feriez pas plaisir; moi je sais bien que cela me serait très désagréable de voir mon nom imprimé tout vif comme cela dans le journal, et je ne serais pas flattée du tout qu’on m’en parlât.» Elle ne s’entêta pas d’ailleurs à persuader les sœurs de ma grand’mère; car celles-ci par horreur de la vulgarité poussaient si loin l’art de dissimuler sous des périphrases ingénieuses une allusion personnelle qu’elle passait souvent inaperçue de celui même à qui elle s’adressait. 🔊✎
← Un instant après il ajouta: «Cela vous donnera une vision aussi noble que n’importe quel chef-d’œuvre, je ne sais pas moi... que»—et il se mit à rire—«les Reines de Chartres!» Jusque-là cette horreur d’exprimer sérieusement son opinion m’avait paru quelque chose qui devait être élégant et parisien et qui s’opposait au dogmatisme provincial des sœurs de ma grand’mère; et je soupçonnais aussi que c’était une des formes de l’esprit dans la coterie où vivait Swann et où par réaction sur le lyrisme des générations antérieures on réhabilitait à l’excès les petits faits précis, réputés vulgaires autrefois, et on proscrivait les «phrases». 🔊✎
← —«Sais-tu ce que j’ai envie de lui faire à cette vieille horreur?» dit-elle en prenant le portrait. Et elle murmura à l’oreille de Mlle Vinteuil quelque chose que je ne pus entendre. —«Oh! tu n’oserais pas.» 🔊✎