← Quel bonheur, c’est déjà le matin! 🔊✎
← Mais je ne peux dire quel malaise me causait pourtant cette intrusion du mystère et de la beauté dans une chambre que j’avais fini par remplir de mon moi au point de ne pas faire plus attention à elle qu’à lui-même. 🔊✎
← On savait quelles avaient été les fréquentations de son père, on savait donc quelles étaient les siennes, avec quelles personnes il était «en situation» de frayer. S’il en connaissait d’autres, c’étaient relations de jeune homme sur lesquelles des amis anciens de sa famille, comme étaient mes parents, fermaient d’autant plus bienveillamment les yeux qu’il continuait, depuis qu’il était orphelin, à venir très fidèlement nous voir; mais il y avait fort à parier que ces gens inconnus de nous qu’il voyait, étaient de ceux qu’il n’aurait pas osé saluer si, étant avec nous, il les avait rencontrés. 🔊✎
← Mais depuis que nous allions à Combray je ne connaissais personne mieux que Françoise; nous étions ses préférés, elle avait pour nous, au moins pendant les premières années, avec autant de considération que pour ma tante, un goût plus vif, parce que nous ajoutions, au prestige de faire partie de la famille (elle avait pour les liens invisibles que noue entre les membres d’une famille la circulation d’un même sang, autant de respect qu’un tragique grec), le charme de n’être pas ses maîtres habituels. Aussi, avec quelle joie elle nous recevait, nous plaignant de n’avoir pas encore plus beau temps, le jour de notre arrivée, la veille de Pâques, où souvent il faisait un vent glacial, quand maman lui demandait des nouvelles de sa fille et de ses neveux, si son petit-fils était gentil, ce qu’on comptait faire de lui, s’il ressemblerait à sa grand’mère. 🔊✎
← Dans l’espèce d’écran diapré d’états différents que, tandis que je lisais, déployait simultanément ma conscience, et qui allaient des aspirations les plus profondément cachées en moi-même jusqu’à la vision tout extérieure de l’horizon que j’avais, au bout du jardin, sous les yeux, ce qu’il y avait d’abord en moi, de plus intime, la poignée sans cesse en mouvement qui gouvernait le reste, c’était ma croyance en la richesse philosophique, en la beauté du livre que je lisais, et mon désir de me les approprier, quel que fût ce livre. 🔊✎
← Mais Bloch avait déplu à mes parents pour d’autres raisons. Il avait commencé par agacer mon père qui, le voyant mouillé, lui avait dit avec intérêt: —«Mais, monsieur Bloch, quel temps fait-il donc, est-ce qu’il a plu? Je n’y comprends rien, le baromètre était excellent.» 🔊✎
← Est-ce que vous pourriez me dire quel est l’acteur qu’il préfère?» 🔊✎
← Mais c’était pourtant à ce genre de plaisirs qu’il employait sa vie. Je trouvais tout cela contradictoire. Pour quelle autre vie réservait-il de dire enfin sérieusement ce qu’il pensait des choses, de formuler des jugements qu’il pût ne pas mettre entre guillemets, et de ne plus se livrer avec une politesse pointilleuse à des occupations dont il professait en même temps qu’elles sont ridicules? 🔊✎
← Un instant (tandis que nous nous éloignions et que mon grand-père murmurait: «Ce pauvre Swann, quel rôle ils lui font jouer: on le fait partir pour qu’elle reste seule avec son Charlus, car c’est lui, je l’ai reconnu! Et cette petite, mêlée à toute cette infamie!») l’impression laissée en moi par le ton despotique avec lequel la mère de Gilberte lui avait parlé sans qu’elle répliquât, en me la montrant comme forcée d’obéir à quelqu’un, comme n’étant pas supérieure à tout, calma un peu ma souffrance, me rendit quelque espoir et diminua mon amour. 🔊✎
← Mlle Vinteuil répondit par des paroles de doux reproche: «Voyons, voyons», qui prouvaient la bonté de sa nature, non qu’elles fussent dictées par l’indignation que cette façon de parler de son père eût pu lui causer (évidemment c’était là un sentiment qu’elle s’était habituée, à l’aide de quels sophismes? à faire taire en elle dans ces minutes-là), mais parce qu’elles étaient comme un frein que pour ne pas se montrer égoïste elle mettait elle-même au plaisir que son amie cherchait à lui procurer. 🔊✎