← Il se disait qu’il n’y a souvent qu’à prendre le contre-pied des réputations que fait le monde pour juger exactement une personne, quand, à un tel caractère, il opposait celui d’Odette, bonne, naïve, éprise d’idéal, presque si incapable de ne pas dire la vérité, que, l’ayant un jour priée, pour pouvoir dîner seul avec elle, d’écrire aux Verdurin qu’elle était souffrante, le lendemain, il l’avait vue, devant Mme Verdurin qui lui demandait si elle allait mieux, rougir, balbutier et refléter malgré elle, sur son visage, le chagrin, le supplice que cela lui était de mentir, et, tandis qu’elle multipliait dans sa réponse les détails inventés sur sa prétendue indisposition de la veille, avoir l’air de faire demander pardon par ses regards suppliants et sa voix désolée de la fausseté de ses paroles. Certains jours pourtant, mais rares, elle venait chez lui dans l’après-midi, interrompre sa rêverie ou cette étude sur Ver Meer à laquelle il s’était remis dernièrement. 🔊✎
← Aussi sa vicieuse façon de parler l’emportant sur son intransigeance républicaine, elle disait encore les de La Trémoïlle ou plutôt par une abréviation en usage dans les paroles des chansons de café-concert et les légendes des caricaturistes et qui dissimulait le de, les d’La Trémoïlle, mais elle se rattrapait en disant: «Madame La Trémoïlle.» «La Duchesse, comme dit Swann», ajouta-t-elle ironiquement avec un sourire qui prouvait qu’elle ne faisait que citer et ne prenait pas à son compte une dénomination aussi naïve et ridicule. 🔊✎