← C’est dans le volume sur son ambassade d’Espagne; ce n’est pas un des meilleurs, ce n’est guère qu’un journal, mais du moins un journal merveilleusement écrit, ce qui fait déjà une première différence avec les assommants journaux que nous nous croyons obligés de lire matin et soir.» «Je ne suis pas de votre avis, il y a des jours où la lecture des journaux me semble fort agréable...», interrompit ma tante Flora, pour montrer qu’elle avait lu la phrase sur le Corot de Swann dans le Figaro. « 🔊✎
← A l’habiter, Combray était un peu triste, comme ses rues dont les maisons construites en pierres noirâtres du pays, précédées de degrés extérieurs, coiffées de pignons qui rabattaient l’ombre devant elles, étaient assez obscures pour qu’il fallût dès que le jour commençait à tomber relever les rideaux dans les «salles»; des rues aux graves noms de saints (desquels plusieurs seigneurs de Combray): rue Saint-Hilaire, rue Saint-Jacques où était la maison de ma tante, rue Sainte-Hildegarde, où donnait la grille, et rue du Saint-Esprit sur laquelle s’ouvrait la petite porte latérale de son jardin; et ces rues de Combray existent dans une partie de ma mémoire si reculée, peinte de couleurs si différentes de celles qui maintenant revêtent pour moi le monde, qu’en vérité elles me paraissent toutes, et l’église qui les dominait sur la Place, plus irréelles encore que les projections de la lanterne magique; et qu’à certains moments, il me semble que pouvoir encore traverser la rue Saint-Hilaire, pouvoir louer une chambre rue de l’Oiseau—à la vieille hôtellerie de l’Oiseau flesché, des soupiraux de laquelle montait une odeur de cuisine qui s’élève encore par moments en moi aussi intermittente et aussi chaude,—serait une entrée en contact avec l’Au-delà plus merveilleusement surnaturelle que de faire la connaissance de Golo et de causer avec Geneviève de Brabant. 🔊✎