← Et cette maladie qu’était l’amour de Swann avait tellement multiplié, il était si étroitement mêlé à toutes les habitudes de Swann, à tous ses actes, à sa pensée, à sa santé, à son sommeil, à sa vie, même à ce qu’il désirait pour après sa mort, il ne faisait tellement plus qu’un avec lui, qu’on n’aurait pas pu l’arracher de lui sans le détruire lui-même à peu près tout entier: comme on dit en chirurgie, son amour n’était plus opérable. 🔊✎
← Car, d’images incomplètes et changeantes Swann endormi tirait des déductions fausses, ayant d’ailleurs momentanément un tel pouvoir créateur qu’il se reproduisait par simple division comme certains organismes inférieurs; avec la chaleur sentie de sa propre paume il modelait le creux d’une main étrangère qu’il croyait serrer et, de sentiments et d’impressions dont il n’avait pas conscience encore faisait naître comme des péripéties qui, par leur enchaînement logique amèneraient à point nommé dans le sommeil de Swann le personnage nécessaire pour recevoir son amour ou provoquer son réveil. 🔊✎
← Mais ces paroles en pénétrant dans les ondes du sommeil où Swann était plongé, n’étaient arrivées jusqu’à sa conscience qu’en subissant cette déviation qui fait qu’au fond de l’eau un rayon paraît un soleil, de même qu’un moment auparavant le bruit de la sonnette prenant au fond de ces abîmes une sonorité de tocsin avait enfanté l’épisode de l’incendie. 🔊✎