mort

www.linternaute.fr

Il n’était pas comme tant de gens qui par paresse, ou sentiment résigné de l’obligation que crée la grandeur sociale de rester attaché à un certain rivage, s’abstiennent des plaisirs que la réalité leur présente en dehors de la position mondaine ils vivent cantonnés jusqu’à leur mort, se contentant de finir par appeler plaisirs, faute de mieux, une fois qu’ils sont parvenus à s’y habituer, les divertissements médiocres ou les supportables ennuis qu’elle renferme. Swann, lui, ne cherchait pas à trouver jolies les femmes avec qui il passait son temps, mais à passer son temps avec les femmes qu’il avait d’abord trouvées jolies. 🔊

Depuis si longtemps il avait renoncé à appliquer sa vie à un but idéal et la bornait à la poursuite de satisfactions quotidiennes, qu’il croyait, sans jamais se le dire formellement, que cela ne changerait plus jusqu’à sa mort; bien plus, ne se sentant plus d’idées élevées dans l’esprit, il avait cessé de croire à leur réalité, sans pouvoir non plus la nier tout à fait. 🔊

Il était extrêmement précis pour une recette de cuisine, pour la date de la naissance ou de la mort d’un peintre, pour la nomenclature de ses œuvres. 🔊

Vois-tu, il n’y a que deux classes d’êtres: les magnanimes et les autres; et je suis arrivé à un âge il faut prendre parti, décider une fois pour toutes qui on veut aimer et qui on veut dédaigner, se tenir à ceux qu’on aime et, pour réparer le temps qu’on a gâché avec les autres, ne plus les quitter jusqu’à sa mort. 🔊

Mais du sein de son état morbide, à vrai dire, il redoutait à l’égal de la mort une telle guérison, qui eût été en effet la mort de tout ce qu’il était actuellement. 🔊

Elle», il essayait de se demander ce que c’était; car c’est une ressemblance de l’amour et de la mort, plutôt que celles si vagues, que l’on redit toujours, de nous faire interroger plus avant, dans la peur que sa réalité se dérobe, le mystère de la personnalité. 🔊

Et cette maladie qu’était l’amour de Swann avait tellement multiplié, il était si étroitement mêlé à toutes les habitudes de Swann, à tous ses actes, à sa pensée, à sa santé, à son sommeil, à sa vie, même à ce qu’il désirait pour après sa mort, il ne faisait tellement plus qu’un avec lui, qu’on n’aurait pas pu l’arracher de lui sans le détruire lui-même à peu près tout entier: comme on dit en chirurgie, son amour n’était plus opérable. 🔊

Et en effet si, à cette époque, il lui arriva souvent sans se l’avouer de désirer la mort, c’était pour échapper moins à l’acuité de ses souffrances qu’à la monotonie de son effort. 🔊

En lui parlant, en lui écrivant, elle n’avait plus de ces mots par lesquels elle cherchait à se donner l’illusion qu’il lui appartenait, faisant naître les occasions de dire «mon», «mien», quand il s’agissait de lui: «Vous êtes mon bien, c’est le parfum de notre amitié, je le garde», de lui parler de l’avenir, de la mort même, comme d’une seule chose pour eux deux. 🔊

La vie de l’amour de Swann, la fidélité de sa jalousie, étaient faites de la mort, de l’infidélité, d’innombrables désirs, d’innombrables doutes, qui avaient tous Odette pour objet. 🔊

Frequency index

Alphabetical index