← Et après qu’il l’eut laissée venir, en le quittant elle lui avait dit son regret d’être restée si peu dans cette demeure où elle avait été heureuse de pénétrer, parlant de lui comme s’il avait été pour elle quelque chose de plus que les autres êtres qu’elle connaissait et semblant établir entre leurs deux personnes une sorte de trait d’union romanesque qui l’avait fait sourire. 🔊✎
← Et c’était peut-être à cause de cela, pour ne pas lui demander toutes les faveurs, qu’il sacrifiait le plaisir moins nécessaire pour lui de la voir plus tôt, d’arriver chez les Verdurin avec elle, à l’exercice de ce droit qu’elle lui reconnaissait de partir ensemble et auquel il attachait plus de prix, parce que, grâce à cela, il avait l’impression que personne ne la voyait, ne se mettait entre eux, ne l’empêchait d’être encore avec lui, après qu’il l’avait quittée. 🔊✎
← Mais il n’aurait pas eu le courage de quitter Paris un seul jour pendant qu’Odette y était. 🔊✎
← Mais comme il aimait Odette, comme il avait l’habitude de tourner vers elle toutes ses pensées, la pitié qu’il eût pu s’inspirer à lui-même ce fut pour elle qu’il la ressentit, et il murmura: «Pauvre chérie!» Quand il la quitta, elle prit plusieurs lettres qu’elle avait sur sa table et lui demanda s’il ne pourrait pas les mettre à la poste. Il les emporta et, une fois rentré, s’aperçut qu’il avait gardé les lettres sur lui. 🔊✎
← Surtout, dirait-il à M. de Forestelle, prenons garde de ne pas tomber sur Odette et les Verdurin; je viens d’apprendre qu’ils sont justement aujourd’hui à Pierrefonds. On a assez le temps de se voir à Paris, ce ne serait pas la peine de le quitter pour ne pas pouvoir faire un pas les uns sans les autres.» Et son ami ne comprendrait pas pourquoi une fois là-bas il changerait vingt fois de projets, inspecterait les salles à manger de tous les hôtels de Compiègne sans se décider à s’asseoir dans aucune de celles où pourtant on n’avait pas vu trace de Verdurin, ayant l’air de rechercher ce qu’il disait vouloir fuir et du reste le fuyant dès qu’il l’aurait trouvé, car s’il avait rencontré le petit groupe, il s’en serait écarté avec affectation, content d’avoir vu Odette et qu’elle l’eût vu, surtout qu’elle l’eût vu ne se souciant pas d’elle. 🔊✎
← —Vous avez remarqué ce qu’a fait cette personne, princesse, dit le général de Froberville à la princesse des Laumes qu’il était venu saluer et que Mme de Saint-Euverte quitta un instant. 🔊✎
← Sans doute Swann était certain que s’il avait vécu maintenant loin d’Odette, elle aurait fini par lui devenir indifférente, de sorte qu’il aurait été content qu’elle quittât Paris pour toujours; il aurait eu le courage de rester; mais il n’avait pas celui de partir. 🔊✎
← Et du moment qu’elle ne voulait pas quitter Paris à jamais, il eût souhaité qu’elle ne le quittât jamais. 🔊✎
← Jadis ayant souvent pensé avec terreur qu’un jour il cesserait d’être épris d’Odette, il s’était promis d’être vigilant, et dès qu’il sentirait que son amour commencerait à le quitter, de s’accrocher à lui, de le retenir. 🔊✎
← Même, comme ce voyageur s’il se réveille seulement en France, quand Swann ramassa par hasard près de lui la preuve que Forcheville avait été l’amant d’Odette, il s’aperçut qu’il n’en ressentait aucune douleur, que l’amour était loin maintenant et regretta de n’avoir pas été averti du moment où il le quittait pour toujours. 🔊✎