← Et après qu’il l’eut laissée venir, en le quittant elle lui avait dit son regret d’être restée si peu dans cette demeure où elle avait été heureuse de pénétrer, parlant de lui comme s’il avait été pour elle quelque chose de plus que les autres êtres qu’elle connaissait et semblant établir entre leurs deux personnes une sorte de trait d’union romanesque qui l’avait fait sourire. 🔊✎
← Le jeune pianiste s’inclina, et, souriant, soulignant les mots comme s’il avait fait un trait d’esprit: —«Vous êtes très indulgente pour moi», dit-il. 🔊✎
← Puis, une fois qu’il l’avait quittée, non sans être rentré pour l’embrasser encore parce qu’il avait oublié d’emporter dans son souvenir quelque particularité de son odeur ou de ses traits, tandis qu’il revenait dans sa victoria, bénissant Odette de lui permettre ces visites quotidiennes, dont il sentait qu’elles ne devaient pas lui causer à elle une bien grande joie, mais qui en le préservant de devenir jaloux,—en lui ôtant l’occasion de souffrir de nouveau du mal qui s’était déclaré en lui le soir où il ne l’avait pas trouvée chez les Verdurin—l’aideraient à arriver, sans avoir plus d’autres de ces crises dont la première avait été si douloureuse et resterait la seule, au bout de ces heures singulières de sa vie, heures presque enchantées, à la façon de celles où il traversait Paris au clair de lune. Et, remarquant, pendant ce retour, que l’astre était maintenant déplacé par rapport à lui, et presque au bout de l’horizon, sentant que son amour obéissait, lui aussi, à des lois immuables et naturelles, il se demandait si cette période où il était entré durerait encore longtemps, si bientôt sa pensée ne verrait plus le cher visage qu’occupant une position lointaine et diminuée, et près de cesser de répandre du charme. 🔊✎
← Sentant que souvent il ne pouvait pas réaliser ce qu’elle rêvait, il cherchait du moins à ce qu’elle se plût avec lui, à ne pas contrecarrer ces idées vulgaires, ce mauvais goût qu’elle avait en toutes choses, et qu’il aimait d’ailleurs comme tout ce qui venait d’elle, qui l’enchantaient même, car c’était autant de traits particuliers grâce auxquels l’essence de cette femme lui apparaissait, devenait visible. 🔊✎
← Alors, progressivement reparaissait et s’élevait en brillant doucement, le visage de l’autre Odette, de celle qui adressait aussi un sourire à Forcheville, mais un sourire où il n’y avait pour Swann que de la tendresse, quand elle disait: «Ne restez pas longtemps, car ce monsieur-là n’aime pas beaucoup que j’aie des visites quand il a envie d’être auprès de moi. Ah! si vous connaissiez cet être-là autant que je le connais!», ce même sourire qu’elle avait pour remercier Swann de quelque trait de sa délicatesse qu’elle prisait si fort, de quelque conseil qu’elle lui avait demandé dans une de ces circonstances graves où elle n’avait confiance qu’en lui. 🔊✎
← Certes l’étendue de cet amour, Swann n’en avait pas une conscience directe. Quand il cherchait à le mesurer, il lui arrivait parfois qu’il semblât diminué, presque réduit à rien; par exemple, le peu de goût, presque le dégoût que lui avaient inspiré, avant qu’il aimât Odette, ses traits expressifs, son teint sans fraîcheur, lui revenait à certains jours. « 🔊✎
← La princesse éclatant d’un rire qui lui était particulier et qui était destiné à la fois à montrer aux autres qu’elle se moquait de quelqu’un et aussi à se faire paraître plus jolie en concentrant les traits de son visage autour de sa bouche animée et de son regard brillant, lui répondit: —Mais le mieux du monde! Et elle rit encore. 🔊✎
← Et une preuve que Swann ne se trompait pas quand il croyait à l’existence réelle de cette phrase, c’est que tout amateur un peu fin se fût tout de suite aperçu de l’imposture, si Vinteuil ayant eu moins de puissance pour en voir et en rendre les formes, avait cherché à dissimuler, en ajoutant çà et là des traits de son cru, les lacunes de sa vision ou les défaillances de sa main. 🔊✎
← Le nom de Beuzeval l’avait fait penser à celui d’une autre localité de cette région, Beuzeville, qui porte uni à celui-là par un trait d’union, un autre nom, celui de Bréauté, qu’il avait vu souvent sur les cartes, mais dont pour la première fois il remarquait que c’était le même que celui de son ami M. de Bréauté dont la lettre anonyme disait qu’il avait été l’amant d’Odette. 🔊✎
← Il se détourna pour regarder Odette, ses joues étaient pâles, avec des petits points rouges, ses traits tirés, cernés, mais elle le regardait avec des yeux pleins de tendresse prêts à se détacher comme des larmes pour tomber sur lui et il se sentait l’aimer tellement qu’il aurait voulu l’emmener tout de suite. 🔊✎