← Il la regardait; un fragment de la fresque apparaissait dans son visage et dans son corps, que dès lors il chercha toujours à y retrouver soit qu’il fût auprès d’Odette, soit qu’il pensât seulement à elle, et bien qu’il ne tînt sans doute au chef-d’œuvre florentin que parce qu’il le retrouvait en elle, pourtant cette ressemblance lui conférait à elle aussi une beauté, la rendait plus précieuse. 🔊✎
← La petite phrase continuait à s’associer pour Swann à l’amour qu’il avait pour Odette. Il sentait bien que cet amour, c’était quelque chose qui ne correspondait à rien d’extérieur, de constatable par d’autres que lui; il se rendait compte que les qualités d’Odette ne justifiaient pas qu’il attachât tant de prix aux moments passés auprès d’elle. 🔊✎
← S’il n’y en avait pas là, les Verdurin prenaient une grande peine pour en faire descendre un d’une chambre ou d’une salle à manger: ce n’est pas que Swann fût rentré en faveur auprès d’eux, au contraire. 🔊✎
← Mais quand il fut rentré chez lui, l’idée lui vint brusquement que peut-être Odette attendait quelqu’un ce soir, qu’elle avait seulement simulé la fatigue et qu’elle ne lui avait demandé d’éteindre que pour qu’il crût qu’elle allait s’endormir, qu’aussitôt qu’il avait été parti, elle l’avait rallumée, et fait rentrer celui qui devait passer la nuit auprès d’elle. 🔊✎
← Alors, progressivement reparaissait et s’élevait en brillant doucement, le visage de l’autre Odette, de celle qui adressait aussi un sourire à Forcheville, mais un sourire où il n’y avait pour Swann que de la tendresse, quand elle disait: «Ne restez pas longtemps, car ce monsieur-là n’aime pas beaucoup que j’aie des visites quand il a envie d’être auprès de moi. Ah! si vous connaissiez cet être-là autant que je le connais!», ce même sourire qu’elle avait pour remercier Swann de quelque trait de sa délicatesse qu’elle prisait si fort, de quelque conseil qu’elle lui avait demandé dans une de ces circonstances graves où elle n’avait confiance qu’en lui. 🔊✎
← S’il était obligé de donner des excuses aux gens du monde pour ne pas leur faire de visites, c’était de lui en faire qu’il cherchait à s’excuser auprès d’Odette. 🔊✎
← Même quand il ne pouvait savoir où elle était allée, il lui aurait suffi pour calmer l’angoisse qu’il éprouvait alors, et contre laquelle la présence d’Odette, la douceur d’être auprès d’elle était le seul spécifique (un spécifique qui à la longue aggravait le mal avec bien des remèdes, mais du moins calmait momentanément la souffrance), il lui aurait suffi, si Odette l’avait seulement permis, de rester chez elle tant qu’elle ne serait pas là, de l’attendre jusqu’à cette heure du retour dans l’apaisement de laquelle seraient venues se confondre les heures qu’un prestige, un maléfice lui avaient fait croire différentes des autres. 🔊✎
← Swann, habitué quand il était auprès d’une femme avec qui il avait gardé des habitudes galantes de langage, de dire des choses délicates que beaucoup de gens du monde ne comprenaient pas, ne daigna pas expliquer à Mme de Saint-Euverte qu’il n’avait parlé que par métaphore. 🔊✎
← Il avait cru qu’il pourrait s’en tenir là, qu’il ne serait pas obligé d’en apprendre les douleurs; comme maintenant le charme d’Odette lui était peu de chose auprès de cette formidable terreur qui le prolongeait comme un trouble halo, cette immense angoisse de ne pas savoir à tous moments ce qu’elle avait fait, de ne pas la posséder partout et toujours! 🔊✎
← Si on la lui avait dépeinte telle qu’elle était, ou plutôt qu’elle avait été si longtemps avec lui, mais auprès d’un autre homme, il eût souffert, car cette image lui eût paru vraisemblable. 🔊✎