← Swann se fit conduire dans les derniers restaurants; c’est la seule hypothèse du bonheur qu’il avait envisagée avec calme; il ne cachait plus maintenant son agitation, le prix qu’il attachait à cette rencontre et il promit en cas de succès une récompense à son cocher, comme si en lui inspirant le désir de réussir qui viendrait s’ajouter à celui qu’il en avait lui-même, il pouvait faire qu’Odette, au cas où elle fût déjà rentrée se coucher, se trouvât pourtant dans un restaurant du boulevard. 🔊✎
← Ce simple croquis bouleversait Swann parce qu’il lui faisait tout d’un coup apercevoir qu’Odette avait une vie qui n’était pas tout entière à lui; il voulait savoir à qui elle avait cherché à plaire par cette toilette qu’il ne lui connaissait pas; il se promettait de lui demander où elle allait, à ce moment-là, comme si dans toute la vie incolore,—presque inexistante, parce qu’elle lui était invisible—, de sa maîtresse, il n’y avait qu’une seule chose en dehors de tous ces sourires adressés à lui: sa démarche sous un chapeau à la Rembrandt, avec un bouquet de violettes au corsage. 🔊✎
← Toujours est-il qu’elle lui avait fait promettre de ne jamais prononcer son nom. La raison pour laquelle elle ne voulait pas aller dans le monde, lui avait-elle dit, était une brouille qu’elle avait eue autrefois avec une amie qui, pour se venger, avait ensuite dit du mal d’elle. Swann objectait: «Mais tout le monde n’a pas connu ton amie.»—«Mais si, ça fait la tache d’huile, le monde est si méchant.» D’une part Swann ne comprit pas cette histoire, mais d’autre part il savait que ces propositions: «Le monde est si méchant», «un propos calomnieux fait la tache d’huile», sont généralement tenues pour vraies; il devait y avoir des cas auxquels elles s’appliquaient. 🔊✎
← Celui-ci, à qui il avait fait part de son projet sans lui en dire le motif, ne se sentait pas de joie et s’émerveillait que Swann, pour la première fois depuis quinze ans, consentît enfin à venir voir sa propriété et, quoiqu’il ne voulait pas s’y arrêter, lui avait-il dit, lui promît du moins de faire ensemble des promenades et des excursions pendant plusieurs jours. 🔊✎
← Il alla ainsi jusqu’à supposer qu’il allait recevoir une lettre d’elle où elle lui demanderait de l’argent pour louer ce château près de Bayreuth, mais en le prévenant qu’il n’y pourrait pas venir, parce qu’elle avait promis à Forcheville et aux Verdurin de les inviter. 🔊✎
← Le baron lui promit d’aller faire la visite qu’il désirait après qu’il l’aurait conduit jusqu’à la porte de l’hôtel Saint-Euverte, où Swann arriva tranquillisé par la pensée que M. de Charlus passerait la soirée rue La Pérouse, mais dans un état de mélancolique indifférence à toutes les choses qui ne touchaient pas Odette, et en particulier aux choses mondaines, qui leur donnait le charme de ce qui, n’étant plus un but pour notre volonté, nous apparaît en soi-même. 🔊✎
← Vous le verrez, car il a promis de venir dîner un de ces jours. 🔊✎
← Tandis que Machard! Tenez justement le mari de l’amie chez qui je vais en ce moment (ce qui me donne le très grand plaisir de faire route avec vous) lui a promis s’il est nommé à l’Académie (c’est un des collègues du docteur) de lui faire faire son portrait par Machard. Évidemment c’est un beau rêve! j’ai une autre amie qui prétend qu’elle aime mieux Leloir. 🔊✎
← Jadis ayant souvent pensé avec terreur qu’un jour il cesserait d’être épris d’Odette, il s’était promis d’être vigilant, et dès qu’il sentirait que son amour commencerait à le quitter, de s’accrocher à lui, de le retenir. 🔊✎
← Mais le plus souvent le temps si particulier de sa vie d’où il sortait, quand il faisait effort sinon pour y rester, du moins pour en avoir une vision claire pendant qu’il le pouvait encore, il s’apercevait qu’il ne le pouvait déjà plus; il aurait voulu apercevoir comme un paysage qui allait disparaître cet amour qu’il venait de quitter; mais il est si difficile d’être double et de se donner le spectacle véridique d’un sentiment qu’on a cessé de posséder, que bientôt l’obscurité se faisant dans son cerveau, il ne voyait plus rien, renonçait à regarder, retirait son lorgnon, en essuyait les verres; et il se disait qu’il valait mieux se reposer un peu, qu’il serait encore temps tout à l’heure, et se rencognait, avec l’incuriosité, dans l’engourdissement, du voyageur ensommeillé qui rabat son chapeau sur ses yeux pour dormir dans le wagon qu’il sent l’entraîner de plus en plus vite, loin du pays, où il a si longtemps vécu et qu’il s’était promis de ne pas laisser fuir sans lui donner un dernier adieu. 🔊✎