← Swann se fit conduire dans les derniers restaurants; c’est la seule hypothèse du bonheur qu’il avait envisagée avec calme; il ne cachait plus maintenant son agitation, le prix qu’il attachait à cette rencontre et il promit en cas de succès une récompense à son cocher, comme si en lui inspirant le désir de réussir qui viendrait s’ajouter à celui qu’il en avait lui-même, il pouvait faire qu’Odette, au cas où elle fût déjà rentrée se coucher, se trouvât pourtant dans un restaurant du boulevard. 🔊✎
← Peut-être sentait-elle qu’il ne pourrait pas y réussir, et même craignait-elle, que rien qu’en parlant d’elle, il ne provoquât des révélations qu’elle redoutait. 🔊✎
← Cet excellent homme souffrait d’être trouvé si ennuyeux par les Verdurin; et ayant conscience d’avoir été plus terne encore à ce dîner que d’habitude, il n’avait voulu le laisser finir sans avoir réussi à amuser. 🔊✎
← Il ne voulait pas perdre contact avec des gens qui—savait-on? pourraient peut-être un jour être utiles à Odette, et grâce auxquels en attendant il réussissait souvent à lui être agréable. 🔊✎
← Et à défaut d’aucun, il priait M. de Charlus de courir chez elle, de lui dire comme spontanément, au cours de la conversation, qu’il se rappelait avoir à parler à Swann, qu’elle voulût bien lui faire demander de passer tout de suite chez elle; mais le plus souvent Swann attendait en vain et M. de Charlus lui disait le soir que son moyen n’avait pas réussi. 🔊✎
← Ces réputations-là, même vraies, sont faites avec les idées des autres»; il pensait que cette légende—fût-elle authentique—était extérieure à Odette, n’était pas en elle comme une personnalité irréductible et malfaisante; que la créature qui avait pu être amenée à mal faire, c’était une femme aux bons yeux, au cœur plein de pitié pour la souffrance, au corps docile qu’il avait tenu, qu’il avait serré dans ses bras et manié, une femme qu’il pourrait arriver un jour à posséder toute, s’il réussissait à se rendre indispensable à elle. 🔊✎
← Si Odette dans la rue ayant reçu d’un passant un salut qui avait éveillé la jalousie de Swann, elle répondait aux questions de celui-ci en rattachant l’existence de l’inconnu à un des deux ou trois grands devoirs dont elle lui parlait, si, par exemple, elle disait: «C’est un monsieur qui était dans la loge de mon amie avec qui je vais à l’Hippodrome», cette explication calmait les soupçons de Swann, qui en effet trouvait inévitable que l’amie eût d’autre invités qu’Odette dans sa loge à l’Hippodrome, mais n’avait jamais cherché ou réussi à se les figurer. 🔊✎
← Quand enfin Swann présenta M. de Froberville à la jeune Mme de Cambremer, comme c’était la première fois qu’elle entendait le nom du général, elle esquissa le sourire de joie et de surprise qu’elle aurait eu si on n’en avait jamais prononcé devant elle d’autre que celui-là, car ne connaissant pas les amis de sa nouvelle famille, à chaque personne qu’on lui amenait, elle croyait que c’était l’un d’eux, et pensant qu’elle faisait preuve de tact en ayant l’air d’en avoir tant entendu parler depuis qu’elle était mariée, elle tendait la main d’un air hésitant destiné à prouver la réserve apprise qu’elle avait à vaincre et la sympathie spontanée qui réussissait à en triompher. 🔊✎
← Et avant que Swann eût eu le temps de comprendre, et de se dire: «C’est la petite phrase de la sonate de Vinteuil, n’écoutons pas!» tous ses souvenirs du temps où Odette était éprise de lui, et qu’il avait réussi jusqu’à ce jour à maintenir invisibles dans les profondeurs de son être, trompés par ce brusque rayon du temps d’amour qu’ils crurent revenu, s’étaient réveillés, et à tire d’aile, étaient remontés lui chanter éperdument, sans pitié pour son infortune présente, les refrains oubliés du bonheur. 🔊✎
← On dit souvent qu’en dénonçant à un ami les fautes de sa maîtresse, on ne réussit qu’à le rapprocher d’elle parce qu’il ne leur ajoute pas foi, mais combien davantage s’il leur ajoute foi. 🔊✎