← Quant au peintre il se réjouissait de l’introduction de Swann chez Mme Verdurin, parce qu’il le supposait amoureux d’Odette et qu’il aimait à favoriser les liaisons. « 🔊✎
← Peut-être qu’on vous favorisera plus que moi, dit Mme Verdurin, sur un ton qui feignait d’être piqué, et qu’on vous montrera le portrait de Cottard (elle l’avait commandé au peintre). Pensez bien, «monsieur» Biche, rappela-t-elle au peintre, à qui c’était une plaisanterie consacrée de dire monsieur, à rendre le joli regard, le petit côté fin, amusant, de l’œil. Vous savez que ce que je veux surtout avoir, c’est son sourire, ce que je vous ai demandé c’est le portrait de son sourire. 🔊✎
← Mais tous ces gens qui faisaient profession d’admirer ce musicien (quand Swann avait dit que sa sonate était vraiment belle, Mme Verdurin s’était écriée: «Je vous crois un peu qu’elle est belle! Mais on n’avoue pas qu’on ne connaît pas la sonate de Vinteuil, on n’a pas le droit de ne pas la connaître», et le peintre avait ajouté: «Ah! c’est tout à fait une très grande machine, n’est-ce pas. Ce n’est pas si vous voulez la chose «cher» et «public», n’est-ce pas, mais c’est la très grosse impression pour les artistes»), ces gens semblaient ne s’être jamais posé ces questions car ils furent incapables d’y répondre. 🔊✎
← —«Mais cela ne l’empêche pas d’être charmante; nous ne disons pas du mal d’elle, nous disons que ce n’est pas une vertu ni une intelligence. Au fond, dit-il au peintre, tenez-vous tant que ça à ce qu’elle soit vertueuse? Elle serait peut-être beaucoup moins charmante, qui sait?» 🔊✎
← En lui disant qu’elle aimerait tant qu’il lui parlât des grands poètes, elle s’était imaginé qu’elle allait connaître tout de suite des couplets héroïques et romanesques dans le genre de ceux du vicomte de Borelli, en plus émouvant encore. Pour Ver Meer de Delft, elle lui demanda s’il avait souffert par une femme, si c’était une femme qui l’avait inspiré, et Swann lui ayant avoué qu’on n’en savait rien, elle s’était désintéressée de ce peintre. 🔊✎
← Et lui, s’apercevant pour la première fois que Forcheville qu’il connaissait depuis longtemps pouvait plaire à une femme et était assez bel homme, avait répondu: «Immonde!» Certes, il n’avait pas l’idée d’être jaloux d’Odette, mais il ne se sentait pas aussi heureux que d’habitude et quand Brichot, ayant commencé à raconter l’histoire de la mère de Blanche de Castille qui «avait été avec Henri Plantagenet des années avant de l’épouser», voulut s’en faire demander la suite par Swann en lui disant: «n’est-ce pas, monsieur Swann?» sur le ton martial qu’on prend pour se mettre à la portée d’un paysan ou pour donner du cœur à un troupier, Swann coupa l’effet de Brichot à la grande fureur de la maîtresse de la maison, en répondant qu’on voulût bien l’excuser de s’intéresser si peu à Blanche de Castille, mais qu’il avait quelque chose à demander au peintre. 🔊✎
← —Qu’est-ce que c’est exactement que cette Mme Verdurin, un demi-castor? dit Forcheville au peintre à qui il proposa de revenir avec lui. Odette le vit s’éloigner avec regret, elle n’osa pas ne pas revenir avec Swann, mais fut de mauvaise humeur en voiture, et quand il lui demanda s’il devait entrer chez elle, elle lui dit: «Bien entendu» en haussant les épaules avec impatience. 🔊✎
← Un soir où Swann avait accepté de dîner avec les Verdurin, comme pendant le dîner il venait de dire que le lendemain il avait un banquet d’anciens camarades, Odette lui avait répondu en pleine table, devant Forcheville, qui était maintenant un des fidèles, devant le peintre, devant Cottard: 🔊✎
← Bien qu’elle ne lui permît pas en général de la rejoindre dans des lieux publics disant que cela ferait jaser, il arrivait que dans une soirée où il était invité comme elle,—chez Forcheville, chez le peintre, ou à un bal de charité dans un ministère,—il se trouvât en même temps qu’elle. 🔊✎