← Mais du sein de son état morbide, à vrai dire, il redoutait à l’égal de la mort une telle guérison, qui eût été en effet la mort de tout ce qu’il était actuellement. 🔊✎
← Et ce plaisir différent de tous les autres, avait fini par créer en lui un besoin d’elle et qu’elle seule pouvait assouvir par sa présence ou ses lettres, presque aussi désintéressé, presque aussi artistique, aussi pervers, qu’un autre besoin qui caractérisait cette période nouvelle de la vie de Swann où à la sécheresse, à la dépression des années antérieures avait succédé une sorte de trop-plein spirituel, sans qu’il sût davantage à quoi il devait cet enrichissement inespéré de sa vie intérieure qu’une personne de santé délicate qui à partir d’un certain moment se fortifie, engraisse, et semble pendant quelque temps s’acheminer vers une complète guérison—cet autre besoin qui se développait aussi en dehors du monde réel, c’était celui d’entendre, de connaître de la musique. 🔊✎
← Idée incomplète,—d’autant plus profonde peut-être—si on la jugeait du point de vue de Swann qui eût sans doute trouvé qu’il était incompris d’Odette, comme un morphinomane ou un tuberculeux, persuadés qu’ils ont été arrêtés, l’un par un événement extérieur au moment où il allait se délivrer de son habitude invétérée, l’autre par une indisposition accidentelle au moment où il allait être enfin rétabli, se sentent incompris du médecin qui n’attache pas la même importance qu’eux à ces prétendues contingences, simples déguisements, selon lui, revêtus, pour redevenir sensibles à ses malades, par le vice et l’état morbide qui, en réalité, n’ont pas cessé de peser incurablement sur eux tandis qu’ils berçaient des rêves de sagesse ou de guérison. Et de fait, l’amour de Swann en était arrivé à ce degré où le médecin et, dans certaines affections, le chirurgien le plus audacieux, se demandent si priver un malade de son vice ou lui ôter son mal, est encore raisonnable ou même possible. 🔊✎