← Il n’y avait pas besoin qu’on eût réellement ces goûts pourvu qu’on les proclamât; d’un homme qui lui avait avoué à dîner qu’il aimait à flâner, à se salir les doigts dans les vieilles boutiques, qu’il ne serait jamais apprécié par ce siècle commercial, car il ne se souciait pas de ses intérêts et qu’il était pour cela d’un autre temps, elle revenait en disant: «Mais c’est une âme adorable, un sensible, je ne m’en étais jamais doutée!» et elle se sentait pour lui une immense et soudaine amitié. 🔊✎
← Idée incomplète,—d’autant plus profonde peut-être—si on la jugeait du point de vue de Swann qui eût sans doute trouvé qu’il était incompris d’Odette, comme un morphinomane ou un tuberculeux, persuadés qu’ils ont été arrêtés, l’un par un événement extérieur au moment où il allait se délivrer de son habitude invétérée, l’autre par une indisposition accidentelle au moment où il allait être enfin rétabli, se sentent incompris du médecin qui n’attache pas la même importance qu’eux à ces prétendues contingences, simples déguisements, selon lui, revêtus, pour redevenir sensibles à ses malades, par le vice et l’état morbide qui, en réalité, n’ont pas cessé de peser incurablement sur eux tandis qu’ils berçaient des rêves de sagesse ou de guérison. Et de fait, l’amour de Swann en était arrivé à ce degré où le médecin et, dans certaines affections, le chirurgien le plus audacieux, se demandent si priver un malade de son vice ou lui ôter son mal, est encore raisonnable ou même possible. 🔊✎
← Vraiment il y a progrès sensible, se disait-il le lendemain; à voir exactement les choses, je n’avais presque aucun plaisir hier à être dans son lit, c’est curieux je la trouvais même laide.» Et certes, il était sincère, mais son amour s’étendait bien au-delà des régions du désir physique. 🔊✎