← Car bien des années ont passé depuis Combray, où, dans nos retours les plus tardifs, c’était les reflets rouges du couchant que je voyais sur le vitrage de ma fenêtre. 🔊✎
← Mais elle entendit mon père qui montait du cabinet de toilette où il était allé se déshabiller et pour éviter la scène qu’il me ferait, elle me dit d’une voix entrecoupée par la colère: «Sauve-toi, sauve-toi, qu’au moins ton père ne t’ait vu ainsi attendant comme un fou!» Mais je lui répétais: «Viens me dire bonsoir», terrifié en voyant que le reflet de la bougie de mon père s’élevait déjà sur le mur, mais aussi usant de son approche comme d’un moyen de chantage et espérant que maman, pour éviter que mon père me trouvât encore là si elle continuait à refuser, allait me dire: «Rentre dans ta chambre, je vais venir.» Il était trop tard, mon père était devant nous. 🔊✎
← La muraille de l’escalier, où je vis monter le reflet de sa bougie n’existe plus depuis longtemps. 🔊✎
← Ce n’était pas seulement parce qu’une image dont nous rêvons reste toujours marquée, s’embellit et bénéficie du reflet des couleurs étrangères qui par hasard l’entourent dans notre rêverie; car ces paysages des livres que je lisais n’étaient pas pour moi que des paysages plus vivement représentés à mon imagination que ceux que Combray mettait sous mes yeux, mais qui eussent été analogues. 🔊✎
← On cherche à retrouver dans les choses, devenues par là précieuses, le reflet que notre âme a projeté sur elles; on est déçu en constatant qu’elles semblent dépourvues dans la nature, du charme qu’elles devaient, dans notre pensée, au voisinage de certaines idées; parfois on convertit toutes les forces de cette âme en habileté, en splendeur pour agir sur des êtres dont nous sentons bien qu’ils sont situés en dehors de nous et que nous ne les atteindrons jamais. 🔊✎
← Et toujours le charme de toutes les idées que faisaient naître en moi les cathédrales, le charme des coteaux de l’Ile-de-France et des plaines de la Normandie faisait refluer ses reflets sur l’image que je me formais de Mlle Swann: c’était être tout prêt à l’aimer. 🔊✎
← Cela a-t-il du bon sens de laisser des fenêtres qui ne donnent pas de jour et trompent même la vue par ces reflets d’une couleur que je ne saurais définir, dans une église où il n’y a pas deux dalles qui soient au même niveau et qu’on se refuse à me remplacer sous prétexte que ce sont les tombes des abbés de Combray et des seigneurs de Guermantes, les anciens comtes de Brabant. Les ancêtres directs du duc de Guermantes d’aujourd’hui et aussi de la Duchesse puisqu’elle est une demoiselle de Guermantes qui a épousé son cousin.» (Ma grand’mère qui à force de se désintéresser des personnes finissait par confondre tous les noms, chaque fois qu’on prononçait celui de la Duchesse de Guermantes prétendait que ce devait être une parente de Mme de Villeparisis. Tout le monde éclatait de rire; elle tâchait de se défendre en alléguant une certaine lettre de faire part: «Il me semblait me rappeler qu’il y avait du Guermantes là-dedans.» Et pour une fois j’étais avec les autres contre elle, ne pouvant admettre qu’il y eût un lien entre son amie de pension et la descendante de Geneviève de Brabant.)—«Voyez Roussainville, ce n’est plus aujourd’hui qu’une paroisse de fermiers, quoique dans l’antiquité cette localité ait dû un grand essor au commerce de chapeaux de feutre et des pendules. ( 🔊✎
← C’était par un temps très chaud; mes parents qui avaient dû s’absenter pour toute la journée, m’avaient dit de rentrer aussi tard que je voudrais; et étant allé jusqu’à la mare de Montjouvain où j’aimais revoir les reflets du toit de tuile, je m’étais étendu à l’ombre et endormi dans les buissons du talus qui domine la maison, là où j’avais attendu mon père autrefois, un jour qu’il était allé voir M. Vinteuil. 🔊✎
← Les regrets que j’en éprouvais, tandis que je restais seul à rêver un peu à l’écart, me faisaient tant souffrir, que pour ne plus les ressentir, de lui-même par une sorte d’inhibition devant la douleur, mon esprit s’arrêtait entièrement de penser aux vers, aux romans, à un avenir poétique sur lequel mon manque de talent m’interdisait de compter. Alors, bien en dehors de toutes ces préoccupations littéraires et ne s’y rattachant en rien, tout d’un coup un toit, un reflet de soleil sur une pierre, l’odeur d’un chemin me faisaient arrêter par un plaisir particulier qu’ils me donnaient, et aussi parce qu’ils avaient l’air de cacher au delà de ce que je voyais, quelque chose qu’ils invitaient à venir prendre et que malgré mes efforts je n’arrivais pas à découvrir. 🔊✎
← Une fois à la maison je songeais à autre chose et ainsi s’entassaient dans mon esprit (comme dans ma chambre les fleurs que j’avais cueillies dans mes promenades ou les objets qu’on m’avait donnés), une pierre où jouait un reflet, un toit, un son de cloche, une odeur de feuilles, bien des images différentes sous lesquelles il y a longtemps qu’est morte la réalité pressentie que je n’ai pas eu assez de volonté pour arriver à découvrir. 🔊✎