← Aussi, quand Françoise allait les voir, à quelques lieues de Combray, maman lui disait en souriant: «N’est-ce pas Françoise, si Julien a été obligé de s’absenter et si vous avez Marguerite à vous toute seule pour toute la journée, vous serez désolée, mais vous vous ferez une raison?» Et Françoise disait en riant: «Madame sait tout; madame est pire que les rayons X (elle disait x avec une difficulté affectée et un sourire pour se railler elle-même, ignorante, d’employer ce terme savant), qu’on a fait venir pour Mme Octave et qui voient ce que vous avez dans le cœur», et disparaissait, confuse qu’on s’occupât d’elle, peut-être pour qu’on ne la vît pas pleurer; maman était la première personne qui lui donnât cette douce émotion de sentir que sa vie, ses bonheurs, ses chagrins de paysanne pouvaient présenter de l’intérêt, être un motif de joie ou de tristesse pour une autre qu’elle-même. 🔊✎
← Ah! il est temps que le Bon Dieu me rappelle, je ne sais plus ce que j’ai fait de ma tête depuis la mort de mon pauvre Octave. 🔊✎
← —«Mais non, madame Octave, mon temps n’est pas si cher; celui qui l’a fait ne nous l’a pas vendu. Je vas seulement voir si mon feu ne s’éteint pas.» 🔊✎
← —«Mais, madame Octave, ce n’est pas encore l’heure de la pepsine, disait Françoise. Est-ce que vous vous êtes senti une faiblesse?» 🔊✎
← —«La fille à M. Pupin! Oh! je vous crois bien, ma pauvre Françoise! Avec cela que je ne l’aurais pas reconnue?» —«Mais je ne veux pas dire la grande, madame Octave, je veux dire la gamine, celle qui est en pension à Jouy. Il me ressemble de l’avoir déjà vue ce matin.» 🔊✎
← —«Dès l’instant que Mme Goupil a de la visite, madame Octave, vous n’allez pas tarder à voir tout son monde rentrer pour le déjeuner, car il commence à ne plus être de bonne heure», disait Françoise qui, pressé de redescendre s’occuper du déjeuner, n’était pas fâchée de laisser à ma tante cette distraction en perspective. 🔊✎
← —«Mais il n’est pas cinq heures, madame Octave, il n’est que quatre heures et demie.» 🔊✎
← —«Tenez, ma pauvre Eulalie, disait-elle d’une voix faible, en tirant une pièce d’une petite bourse qu’elle avait à portée de sa main, voilà pour que vous ne m’oubliez pas dans vos prières.» —«Ah! mais, madame Octave, je ne sais pas si je dois, vous savez bien que ce n’est pas pour cela que je viens!» disait Eulalie avec la même hésitation et le même embarras, chaque fois, que si c’était la première, et avec une apparence de mécontentement qui égayait ma tante mais ne lui déplaisait pas, car si un jour Eulalie, en prenant la pièce, avait un air un peu moins contrarié que de coutume, ma tante disait: —«Je ne sais pas ce qu’avait Eulalie; je lui ai pourtant donné la même chose que d’habitude, elle n’avait pas l’air contente.» 🔊✎
← Voilà-t-il pas que je rêvais que mon pauvre Octave était ressuscité et qu’il voulait me faire faire une promenade tous les jours!» Sa main se tendit vers son chapelet qui était sur la petite table, mais le sommeil recommençant ne lui laissa pas la force de l’atteindre: elle se rendormit, tranquillisée, et je sortis à pas de loup de la chambre sans qu’elle ni personne eût jamais appris ce que j’avais entendu. 🔊✎
← Mais Françoise doit le savoir maintenant que vous y avez donné une voiture».—«Que je lui ai donné une voiture!» s’écriait ma tante.—«Ah! mais je ne sais pas, moi, je croyais, je l’avais vue qui passait maintenant en calèche, fière comme Artaban, pour aller au marché de Roussainville. J’avais cru que c’était Mme Octave qui lui avait donné.» Peu à peu Françoise et ma tante, comme la bête et le chasseur, ne cessaient plus de tâcher de prévenir les ruses l’une de l’autre. 🔊✎