← En revanche ce qui était invariable maintenant, c’était que où que Swann se trouvât, il ne manquât pas d’aller rejoindre Odette. 🔊✎
← Il n’allait chez elle que le soir, et il ne savait rien de l’emploi de son temps pendant le jour, pas plus que de son passé, au point qu’il lui manquait même ce petit renseignement initial qui, en nous permettant de nous imaginer ce que nous ne savons pas, nous donne envie de le connaître. 🔊✎
← Sans doute Swann avait pour Odette une affection trop particulière et dont il avait négligé de faire de Mme Verdurin la confidente quotidienne: sans doute la discrétion même avec laquelle il usait de l’hospitalité des Verdurin, s’abstenant souvent de venir dîner pour une raison qu’ils ne soupçonnaient pas et à la place de laquelle ils voyaient le désir de ne pas manquer une invitation chez des «ennuyeux», sans doute aussi, et malgré toutes les précautions qu’il avait prises pour la leur cacher, la découverte progressive qu’ils faisaient de sa brillante situation mondaine, tout cela contribuait à leur irritation contre lui. 🔊✎
← Il capitula si vite, eut l’air si malheureux de voir manqué l’effet sur lequel il avait compté et répondit d’un ton si lâche à Swann pour que celui-ci ne s’acharnât pas à une réfutation désormais inutile: «C’est bon, c’est bon; en tous cas, même si je me trompe, ce n’est pas un crime, je pense» que Swann aurait voulu pouvoir dire que l’histoire était vraie et délicieuse. 🔊✎
← Certes Swann avait souvent pensé qu’Odette n’était à aucun degré une femme remarquable; et la suprématie qu’il exerçait sur un être qui lui était si inférieur n’avait rien qui dût lui paraître si flatteur à voir proclamer à la face des «fidèles», mais depuis qu’il s’était aperçu qu’à beaucoup d’hommes Odette semblait une femme ravissante et désirable, le charme qu’avait pour eux son corps avait éveillé en lui un besoin douloureux de la maîtriser entièrement dans les moindres parties de son cœur. Et il avait commencé d’attacher un prix inestimable à ces moments passés chez elle le soir, où il l’asseyait sur ses genoux, lui faisait dire ce qu’elle pensait d’une chose, d’une autre, où il recensait les seuls biens à la possession desquels il tînt maintenant sur terre. Aussi, après ce dîner, la prenant à part, il ne manqua pas de la remercier avec effusion, cherchant à lui enseigner selon les degrés de la reconnaissance qu’il lui témoignait, l’échelle des plaisirs qu’elle pouvait lui causer, et dont le suprême était de le garantir, pendant le temps que son amour durerait et l’y rendrait vulnérable, des atteintes de la jalousie. 🔊✎
← Elle lui redisait tout le temps: «Quel malheur que toi, qui ne viens jamais l’après-midi, pour une fois que cela t’arrive, je ne t’aie pas vu.» Il savait bien qu’elle n’était pas assez amoureuse de lui pour avoir un regret si vif d’avoir manqué sa visite, mais comme elle était bonne, désireuse de lui faire plaisir, et souvent triste quand elle l’avait contrarié, il trouva tout naturel qu’elle le fût cette fois de l’avoir privé de ce plaisir de passer une heure ensemble qui était très grand, non pour elle, mais pour lui. 🔊✎
← Aussi aurait-elle écouté Swann avec le plus grand calme si elle n’avait vu que l’heure passait et que pour peu qu’il parlât encore quelque temps, elle allait, comme elle le lui dit avec un sourire tendre, obstiné et confus, «finir par manquer l’Ouverture!» 🔊✎
← Il ne sortait pas de peur de manquer une dépêche, ne se couchait pas, pour le cas où, revenue par le dernier train, elle aurait voulu lui faire la surprise de venir le voir au milieu de la nuit. 🔊✎
← Swann refusa; ayant prévenu M. de Charlus qu’en quittant de chez Mme de Saint-Euverte il rentrerait directement chez lui, il ne se souciait pas en allant chez la princesse de Parme de risquer de manquer un mot qu’il avait tout le temps espéré se voir remettre par un domestique pendant la soirée, et que peut-être il allait trouver chez son concierge. « 🔊✎
← Avoir du cœur c’est tout, et M. de Charlus en avait. M. d’Orsan n’en manquait pas non plus et ses relations cordiales mais peu intimes avec Swann, nées de l’agrément que, pensant de même sur tout, ils avaient à causer ensemble, étaient de plus de repos que l’affection exaltée de M. de Charlus, capable de se porter à des actes de passion, bons ou mauvais. 🔊✎